Les Dix Clés Du Commentaire De Texte

 


vLE COURS THEORIQUE

L’exercice du commentaire ne vise rien de moins qu’à faire acquérir à l’élève les outils ou instruments nécessaires à la compréhension et à l’étude d’un texte. Se faisant, l’apprenant sera à même d’en faire ressortir les tenants et les aboutissants, d’en dévoiler toutes les richesses.

Que ce soit avec le commentaire suivi ou avec le commentaire composé, le travail comporte toujours trois grandes parties. Cependant, avant que de nous intéresser à ces différentes parties, nous allons décliner les instruments du commentaire.

I-             LES INSTRUMENTS DU COMMENTAIRE

Ils sont nombreux. L’élève s’efforcera de les exploiter et de les combiner avec pertinence. Un seul instrument peut lui permettre de bien expliquer le texte. Si l’on assimile le texte à une chambre fermée avec plusieurs portes, chaque instrument devient une clé qui aide à ouvrir le texte. Ainsi on distingue :

1-  Le Paratexte

Etant donné que le préfixe « para » veut dire presque ou autour, le paratexte signifie tout ce qui est autour du texte à commenter ou bien tout ce qui entoure ce texte. Cette clé emporte avec lui un réseau de sens. Avec lui, on peut avoir des renseignements sur la biographie ou l’idéologie de l’auteur (mouvement littéraire), sur le contexte historique de l’œuvre (époque, temps, société).  Afin de mieux guider les apprenants, nous allons décliner avec le texte ci-dessous les différents éléments paratextuels.

 

Cas pratique : Texte n°1 

Ultíma verba

[…] Oui, tant qu’il sera là, qu’on cède ou qu’on persiste,

O France ! France aimée et qu’on pleure toujours,

Je ne reverrai pas ta terre douce et triste,

Tombeau de mes aïeux et nid de mes amours !

 

Je ne reverrai pas ta rive qui nous tente,

France ! hors le devoir, hélas ! j’oublîrai tout.

Parmi les éprouvés je planterai ma tente.

Je resterai proscrit, voulant rester debout.

 

J’accepte l’âpre exil, n’eût-il ni fin ni terme,

Sans chercher à savoir et sans considérer

Si quelqu’un a plié qu’on aurait cru plus ferme,

Et si plusieurs s’en vont qui devraient demeurer.

 

Si l’on n’est plus que mille, eh bien, j’en suis ! Si même                      

Ils ne sont plus que cent, je brave encor Sylla ;

S’il en demeure dix, je serai le dixième ;

Et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là !

Victor Hugo. Les Châtiments(1853). Jersey, 2 décembre 1852 (date symbolique), 14 décembre 1852 (date portée par le manuscrit).

 

 

 

 

Avec ce poème ci-dessus, on a comme élément paratextuel :

-       le titre du poème « Ultíma verba » qui signifie Mon dernier mot ou bien Mes dernières paroles ;

-       le nom de l’auteur Victor Hugo qui est le leader du romantisme ;

-       le titre du recueil d’où est tiré le poème à savoir Les Châtiments qui s’inscrit dans le triptyque biblique du crime, châtiment et de l’expiation. Qui a commis un crime ici ? Napoléon III. Quel est le crime ? Un coup d’état. C’est à Hugo que revient la responsabilité de lui appliquer un châtiment avec les poèmes de son recueil.

-       la date symbolique qui renvoie au coup d’état constitutionnel de Napoléon III et la date de publication du recueil qui réfère au second empire.  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2-   La Typologie

C’est une clé qui nous permet de savoir le type de texte qu’on a en face de nous. Selon le type, le commentaire suit une certaine direction. En nous inspirant de Jean-Michel Adam[1], nous pouvons avancer que les différents types de texte sont d’ordre narratif, descriptif, explicatif, argumentatif, injonctif, théâtral ou poétique.

Ayons présent à l’esprit qu’un texte se présente soit de manière homogène soit de manière  hétérogène : il peut convoquer un seul type ou plusieurs types.  

Cas pratique : Texte n°2 

 Mors

Je vis cette faucheuse. Elle était dans son champ.

Elle allait à grands pas moissonnant et fauchant,

Noir squelette laissant passer le crépuscule.

Dans l’ombre où l’on dirait que tout tremble et recule,

L’homme suivait des yeux les lueurs de la faulx.

Et les triomphateurs sous les arcs triomphaux

Tombaient ; elle changeait en désert Babylone,

Le trône en l’échafaud et l’échafaud en trône,

Les roses en fumier, les enfants en oiseaux,

L’or en cendre, et les yeux des mères en ruisseaux.

Et les femmes criaient : − Rends-nous ce petit être.

Pour le faire mourir, pourquoi l’avoir fait naître ? –

Ce n’était qu’un sanglot sur terre, en haut, en bas ;

Des mains aux doigts osseux sortaient des noirs grabats ;

Un vent froid bruissait dans les linceuls sans nombre ;

Les peuples éperdus semblaient sous la faulx sombre

Un troupeau frissonnant qui dans l’ombre s’enfuit ;

Tout était sous ses pieds deuil, épouvante et nuit.

Derrière elle, le front baigné de douces flammes,

Un ange souriant portait la gerbe d’âmes.

Victor HUGO, Les Contemplations, 1856.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ce poème, du point de vue de la typologie, offre un visage très riche. Si d’emblée, il présente les caractéristiques du type poétique, son analyse prouve à souhait qu’il est à la fois narratif, descriptif et dialogal.

L’étude du poème montre qu’il ne fait pas partie des formes fixes : ce qui ouvre plusieurs pistes. Au-delà de la configuration rimique (rimes masculines et féminines ; rimes plates ; rimes pauvres, suffisantes et riches), nous notons des rythmes particuliers et divers (par exemple, le rythme binaire du vers 2, le rythme symétrique du vers 8, le rythme parallèle du vers 14, le rythme ternaire du vers 19…) impliquant le désordre et l’anarchie typiques de la fin des temps.

Dire que ce texte est narratif implique un narrateur et un ou des narrataire(s). dans la même logique, il importe de décliner les différents actants (deux anges, la faulx, le narrateur, les femmes, les enfants, les peuples, etc.)

Dire que ce texte est descriptif pousse à savoir s’il s’agit d’un espace décrit ou d’un espace voire les deux à la fois (l’espace de la mort est décrit mais aussi les anges comme les humains). Le comment de la description interpelle aussi : la verticalité, l’horizontalité ou la circularité ?

Dire que ce texte est dialogal signifie qu’on a un dialogue ou des dialogues (narrateur et narrataires ; les femmes et l’ange de la mort…). Un dialogue entraînant des prises de parole, il convient d’étudier les différents discours (direct, indirect ou indirect libre).

Ces quelques indices confirment que la typologie n’est pas un instrument de moindre envergure. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


3-   La tonalité

Appelée encore ton ou registre, elle influence la thématique textuelle. Selon la tonalité, l’on a un certain nombre de thèmes qui lui sont attachés. Aussi distingue-t-on des registres : 

-       lyrique : le texte est truffé de sentiments (textes n°5 et 6) ; 

-       pathétique : on est triste à la lecture ; on est au bord des larmes ; on a envie de pleurer (textes n°6 et 10) ;

-       tragique : le spectacle du malheur, du drame ou de la mort est omniprésent dans le texte (texte n°2 et 10) ;

-       comique : les scènes et les personnages prêtent à sourire et à rire déclenchant la gaîté et la joie chez le public des lecteurs et des spectateurs;

-       polémique : celui qui écrit ou parle dans le texte est dans un débat contradictoire. Il attaque, contre-attaque et fusille son vis-à-vis ou ses contempteurs. Il est dans une logique d’opposition et de combat (textes n°3 et 7) ;

-       didactique : ici affleurent les conseils, les leçons voire les leçons de morale. On cherche à éveiller les consciences, à les réveiller et à les mettre sur le droit chemin, la voie salvatrice. C’est le cas souvent avec les contes ou les fables (textes n°11 et 12) ;

-       fantastique : le texte porte de lourdes traces du merveilleux, du surnaturel voire du mystère (texte n°11) ;

-       épique : c’est un ton qui renvoie aux récits de bataille, aux confrontations. Ces dernières sont souvent démesurées car opposant souvent le faible et le fort, le petit et le grand, le bien et le mal. Il réfère aussi aux faits d’armes et aux exploits d’un guerrier (texte n°9).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cas pratique : Texte n°11

  

 Le Chêne et le roseau

Le Chêne un jour dit au Roseau : 
Vous avez bien sujet d’accuser la Nature.
Un Roitelet pour vous est un pesant fardeau.
Le moindre vent qui d’aventure
Fait rider la face de l’eau
Vous oblige à baisser la tête : 
Cependant que mon front au Caucase pareil,
Non content d’arrêter les rayons du Soleil,
Brave l’effort de la tempête.
Tout vous est Aquilon ; tout me semble Zéphyr.
Encor si vous naissiez à l’abri du feuillage
Dont je couvre le voisinage ; 
Vous n’auriez pas tant à souffrir ; 
Je vous défendrais de l’orage : 
Mais vous naissez le plus souvent
Sur les humides bords des Royaumes du vent.
La Nature envers vous me semble bien injuste.
Votre compassion, lui répondit l’Arbuste, 
Part d’un bon naturel ; mais quittez ce souci.
Les vents me sont moins qu’à vous redoutables.
Je plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu’ici
Contre leurs coups épouvantables
Résisté sans courber le dos : 
Mais attendons la fin. Comme il disait ces mots,
Du bout de l’horizon accourt avec furie
Le plus terrible des enfants
Que le Nord eût porté jusque-là dans ses flancs.
L’Arbre tient bon, le Roseau plie ; 
Le vent redouble ses efforts, 
Et fait si bien qu’il déracine
Celui de qui la tête au Ciel était voisine, 
Et dont les pieds touchaient à l’Empire des Morts.

Jean de La Fontaine. Les Fables, 1668.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Avec cette fable de Jean de La Fontaine, nous relevons comme registre :

-       celui didactique (des leçons de morale implicites) ;

-       celui polémique (une confrontation de points de vue et jets de piques) ;

-       celui fantastique (des arbres qui parlent) ;

-       celui épique (l’opposition entre un petit et un grand).

Ce qui est intéressant avec cette clé, c’est que chaque tonalité implique un certain nombre de thèmes d’où des champs lexicaux pertinents donc une facilité pour trouver rapidement des centres d’intérêt fédérateurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

4-   L’énonciation

La décomposition du mot « énonciation » donne un suffixe « -ation » (qui signifie action de) et un radical « énoncé » (qui signifie message ou texte). En termes simples, le vocable renvoie à l’action de produire un message. En tant qu’apprenti littéraire, lorsque nous actionnons cette clé, nous nous intéressons à la production d’un texte. Aussi pose-t-on les questions suivantes au texte :

-      Qui parle dans le texte (en prose ou en vers) ;

-      A qui s’adresse-t-il ?

-      De quoi s’agit-il dans le texte ?

-      Pourquoi parle-t-il ?

-      Comment parle-t-il ?

-      Quand parle-t-il ?

Les réponses pertinentes à ces questions peuvent constituer un bon début de commentaire du texte.

Cas pratique : Texte n°13 :« L’Ouragan »

L’ouragan arrache tout autour de moi

Et l’ouragan arrache en moi feuilles et paroles futiles.

Des tourbillons de passion sifflent en silence

Mais paix sur la tornade sèche, sur la fuite de l’hivernage !

 

Toi Vent ardent Vent pur, Vent-de-belle-saison, brûle

      toute fleur toute pensée vaine

Quand retombe le sable sur les dunes du cœur. 

Servante, suspends ton geste de statue et vous, enfants,

     vos jeux et vos rires d’ivoire.

Toi, qu’elle consume ta voix avec ton corps, qu’elle

     sèche le parfum de ta chair 

La flamme qui illumine ma nuit, comme une colonne

       et comme une palme.

Embrase mes lèvres de sang, Esprit, souffle sur les

       cordes de ma kôra

Que s’élève mon chant, aussi pur que l’or de Galam.

Léopold Sédar Senghor. Chants d’ombre, 1945.

 

 

 

En actionnant la clé « énonciation », nous nous retrouvons avec les réponses suivantes. C’est le poète Senghor qui parle et écrit dans ce poème. Il s’adresse à plusieurs destinataires. Dans un cadre général, c’est tout locuteur francophone qui lit « L’Ouragan ». Si on focalise sur le texte, on se rend compte que le « dyâli » sérère apostrophe différents actants : d’abord l’élément éolien sous forme d’invocations (le Vent est même personnifié) ; ensuite, son environnement familial (la servante, les enfants et sa compagne) ; enfin, sa muse inspiratrice (« Esprit »). 

 

Par ailleurs, le frère de Tyagoum-Ndyaré métaphorise ici l’acte créateur chez le poète nègre. Il déroule ici ses conditions de faisabilité (les invocations, le calme plat et l’assistance de la muse). Son discours combine la demande insistante et les injonctions. L’on pourrait dire que les motivations de Senghor résident dans le fait qu’il voudrait différencier le poète nègre de son homologue blanc. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

5-   Les instruments du vocabulaire

Pour l’apprenant qui actionne cette clé (considérée comme la plus simple et la plus utilisée), il est question de s’interroger sur le sens des mots employés dans le texte. Ces derniers peuvent l’être au sens propre ou au sens figuré.

Il faut aussi avoir présent à l’esprit que tout texte (même s’il est court) comporte un certain nombre de champs lexicaux. Si le candidat parvient à les dégager avec pertinence, il décortiquera facilement la sémantique du texte. En parlant de sémantique, l’exploitation de cette clé peut s’arrêter sur un ou deux champs sémantiques présent (s) dans le texte.

Pour rappel, le champ lexical désigne l’ensemble des mots, expressions, vers (ou phrases) ou segments de vers (ou segments de phrase) qui renvoient à une même idée, à une même notion ou bien à un même domaine. Prenons l’exemple du champ lexical de la chaleur, nous pouvons avoir des termes comme chaleur, tison, ardent, braises, feu, lave, canicule… Si le champ lexical est l’école, nous pouvons rencontrer des vocables comme l’école, les classes, les professeurs, les élèves, les surveillants, le proviseur, le censeur, etc.

Pour rappel, on a le champ sémantique quand un mot est utilisé à deux ou plusieurs reprises dans le même texte avec des sens différents. Par exemple, prenons le mot « feu ». Si dans le texte qu’on étudie, on trouve le vers ou la phrase suivant : « le feu qui la dévore allume des feux partout, même dans la demeure de feu son époux ».

 Le premier « feu » signifie la passion amoureuse, le deuxième, les conflits et le troisième celui qui est mort.  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cas pratique : Texte n°6 :«Trois ans après »

Il est temps que je me repose ;

Je suis terrassé par le sort.

Ne me parlez pas d’autre chose

Que des ténèbres où l’on dort ! 

 

Que veut-on que je recommence ?

Je ne demande désormais

A la création immense

Qu’un peu de silence et de paix !

 

A vingt ans, deuil et solitude !

Mes yeux, baissés vers le gazon,

Perdirent la douce habitude

De voir ma mère à la maison.

 

Elle nous quitta pour la tombe ;

Et vous savez bien qu’aujourd’hui

Je cherche, en cette nuit qui tombe,

Un autre ange qui s’est enfui !

 Victor Hugo, Les Contemplations, 1856.

 

La clé « les instruments du vocabulaire » semble a priori la plus accessible, la plus maniable et la plus facile pour le commentateur d’un texte littéraire. Avec cet extrait de « Trois ans après » des Contemplations, l’évaluation peut se faire à trois niveaux.

Le premier palier nous amène à voir quels sont les mots ou expressions qui sont employés au sens figuré. Aussi, en relevons-nous trois :

-       « que je me repose » qui dans un sens figuré pourrait signifier que je meure ;

-       « les ténèbres où l’on dort » qui ne renvoie pas au monde nocturne mais à celui de l’au-delà ;

-       « un autre ange » qui ne réfère pas à un collègue de l’Ange Gabriel mais simplement à un être humain innocent et pur.

Le deuxième palier de cette clé focalise sur la notion de champ sémantique. Celui qui appert dans cet extrait s’arrête sur l’occurrence du mot « tombe ». Dans un premier temps, celui-ci est utilisé comme nom au vers 13 et dans un deuxième temps, comme verbe au vers 15. La première occurrence renvoie à l’au-delà et la seconde à la chute, à la fin du jour. Les deux utilisations impliquent la notion d’obscurité et de mouvement vers le bas. C’est une façon pour le poète de dire qu’il décline lui aussi, qu’il s’achemine vers le déclin, qu’il ne vit plus mais vivote. Il respire certes mais il est à bout de souffle. Plutôt que de vivre normalement, il est devenu un mort-vivant.

Enfin, le troisième palier de cette cinquième clé s’attache à relever les principaux champs lexicaux qui jalonnent ce texte. Nous en avons convoqué six :

-       La malchance :je suis terrassé par le sort ; vers 9 ; vers 15 et vers 16 ;

-       La perte :vers 3 et vers 4 ; vers 8 ; vers 9 ; vers 10 ; vers 11 et vers 12 ; vers 13 ; vers 16 ;

-       Le malheur : vers 3 et vers 4 ; vers 9 ; vers 10 ; vers 11 et vers 12 ;

-       L’indifférence :vers 3 et vers 4 ; vers 6, vers 7 et vers 8 ; vers 10 ;

-       La démission :vers 1 ; vers 2 ; vers 3 et vers 4 ; vers 5 ; vers 6, vers 7 et vers 8 ;

-       L’au-delà :que je me repose ; des ténèbres où l’on dort ; deuil ; la tombe ; un autre ange.

Le travail sur les champs lexicaux ne s’arrête pas seulement à leur illustration. Les mots et/ou expressions qui composent un champ lexical doivent être interprétés à bon escient. Prenons par exemple celui de l’indifférence : il s’agit de construire avec les éléments sélectionnés dudit champ lexical un ou des paragraphe(s) du développement. Veuillez apprécier les lignes suivantes :

La destinée du poète n’est pas des plus reluisantes. Des êtres chers l’ont quitté sans crier gare. Chaque disparition l’a laissé seul et déboussolé. Aussi ne manifeste-t-il pas de la joie ou de l’envie pour son monde alentour. Il existe un parallélisme de comportements entre le poète adulte et celui enfant d’où l’attitude « Mes yeux baissés vers le gazon ».

Ce manque d’intérêt pour la vie présente impacte sur l’activité littéraire et professionnelle du poète. Lui, l’écrivain talentueux, refuse désormais de produire des livres. Lui, l’écrivain engagé, ne veut plus être dans les remous du monde. Ce qui explique sa prière, son souhait voire son désir d’ « un peu de silence et de paix ! »

Voilà donc deux paragraphes du développement issus de l’interprétation du champ lexical de l’indifférence.

Les champs lexicaux sont regroupés en fonction de leur degré de proximité ou d’acccointance. Avec le commentaire composé, on propose au candidat des centres d’intérêt. C’est à l’élève de décider avec quel centre d’intérêt va chaque champ lexical pertinent.

 

Une remarque de taille :si l’élève est affûté et expert en commentaire, il peut trouver ses propres centres d’intérêt et les préférer à ceux proposés par le commentaire. Pour cela, il sera obligé de procéder avec rigueur et pertinence dans le travail de sélection des champs lexicaux. Puis, il les regroupera en fonction de leur parenté sémantique. A chaque groupe de champs lexicaux, il donnera un titre fédérateur dont la pertinence coulera de source.  

Enfin, le dernier mais pas le moindre, le candidat évitera d’illustrer ses paragraphes du développement avec uniquement les éléménts constitutifs des champs lexicaux. Il ne doit pas oublier de faire dans l’équilibre entre les illustrations de fond et celles de forme (les aspects de la versification, les outils de grammaire, les figures de style …)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

6-   Les figures de style

Le style d’un écrivain n’est ni gratuit ni innocent. Elle est une forme-sens. Le fond et la forme s’illustrent. A cet effet, l’usage des figures de style de la part de l’auteur vise à produire un effet de sens qu’il appartient au commentateur de décoder. Il urge de remarquer que les différentes figures sont réparties en groupes différents. Aussi, distingue-t-on des figures :

-      de substitution ;

-      de comparaison (la comparaison, la métaphore, la personnification, l’allégorie…) ;

-      d’opposition (l’oxymore, l’alliance de mots, l’antithèse, le chiasme, l’antiphrase…) ;

-      d’atténuation (la litote, l’euphémisme…) ;

-      d’exagération (l’hyperbole) ;

-      d’insistance (le pléonasme, l’anaphore, l’épiphore, l’anadiplose..). 

 

Cas pratique : Texte n°3:

Travail mauvais qui prend l’âge tendreen sa serre,

Qui produitla richesse en créantla misère,

Qui se sertd’un enfant ainsi que d’un outil !

Progrès dont on se demande : « Où va-t-il ? Que veut-il ? »

Qui brisela jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,

Une âme à la machine et la retire à l’homme !

Que ce travail, haï des mères, soit maudit !

Mauditcomme le viceoù l’on s’abâtardit,

Mauditcomme l’opprobreet comme le blasphème !

Ô Dieu ! qu’il soit maudit au nom du travail même,

Au nom du vrai travail, saint, fécond, généreux,

Qui fait le peuple libre et qui rend l’homme heureux !

Victor HUGO, « Melancholia » in : Les Contemplations(1856), III, 2.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Si nous ne nous abusons, ce texte compte en tout et pour tout dix neuf figures de style. Quelque soit la figure, son intérêt n’est pas pour le candidat de la mentionner. L’apprenant doit montrer à quel fin ou dans quel but l’auteur du texte à commenter l’a utilisée. Il aura à cœur de démontrer avec chaque figure de style relevée dans le corps du texte ses facultés interprétatives. Il l’utilisera en guise d’illustration pour clôturer son paragraphe du développement. Le soulignement d’une figure de style et sa bonne interprétation prouvent au correcteur que le commentateur tient à faire un commentaire simultané du fond et de la forme du texte. Cela est très apprécié des censeurs que sont les examinateurs.

Si vous regardez le texte ci-dessus, vous remarquerez une palette de couleurs. Chaque couleur renvoie à une ou des figure(s) de style. Aussi relevons-nous successivement :

·     des personnifications (du travail) :

-      « Travail mauvais qui prend l’âge tendre en sa serre, »

-      « Progrès dont on se demande : « Où va-t-il ? Que veut-il ? »

-      « Qui se sert d’un enfant ainsi que d’un outil ! »

-       « Qui brise la jeunesse en fleur ! »

-      « […] qui donne, en somme,

-      Une âme à la machine et la retire à l’homme ! »

-      « Qui produit la richesse en créant la misère, »

·     des périphrases :

-       « l’âge tendre »

-       « la jeunesse en fleur »

·     une métaphore :

-       « sa serre »

·     une antithèse :

-      « Qui produit la richesse en créant la misère, »

·     des comparaisons :

-       « ainsi que d’un outil »

-       « comme le vice »

-       « comme l’opprobre »

-       « comme le blasphème »

·     une anadiplose :

-      « Que ce travail, haï des mères, soit maudit !

Mauditcomme le vice où l’on s’abâtardit, »

·     une anaphore :

-      « Mauditcomme le vice où l’on s’abâtardit,

Mauditcomme l’opprobre et comme le blasphème ! »

·     une apostrophe :

-       « Ô Dieu ! »

·     une accumulation :

-      « Au nom du vrai travail, saint, fécond, généreux, »

·     un parallélisme :

-      « Qui fait le peuple libre et qui rend l’homme heureux ! »

 

Pour ce qui est de l’intérêt (ou de la signification) des figures de style, l’on pourrait dire à titre d’exemple que :

-       La comparaison du vers 3 met en exergue l’instrumentalisation de l’enfant ;

-       L’antithèse du vers 2 dénonce vigoureusement le déséquilibre social qu’engendre le « mauvais travail »

-       L’accumulation de l’avant-dernier vers est là pour nous faire appréhender les principaux caractéristiques d’un bon travail.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

7-   Les traits de versification

Cas pratique : Texte n°20 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

8-   Les outils de grammaire

Pour exploiter à bon escient cet instrument du commentaire, le candidat doit maîtriser ses règles de grammaire, ses tables de conjugaison et ses leçons d’orthographe. Le point de départ d’une telle expertise reste la connaissance et non la méconnaissance des neuf classes grammaticales (ou types de mot) qui existent en français. Chaque mot, de par son emploi ou sa fonction est à utiliser avantageusement dans le cadre du commentaire. C’est ainsi que l’exploitation des valeurs temporelles ou modales est du plus haut intérêt et de la plus haute importance. A titre de rappel, le seul présent simple peut avoir huit valeurs ou significations : 

-      le présent d’actualité : Le Président se prononce présentement sur la situation du pays ;

-      le présent d’habitude : Chaque jour, il lave son cheval ;

-      le présent injonctif : Tu fermes la porte en sortant ;

-      le présent historique : Lat-Dior est mort à Derklé en 1886 ;

-      le présent duratif : Nous faisons du karaté depuis dix ans ;

-      le présent de vérité générale : Nul ne sait. Seul Dieu sait ;

-      le présent à valeur de passé récent : Nous revenons de la plage ;

-      le présent à valeur de futur proche : J’arrive dans trente minutes.

Partant du fait que tout texte a un temps dominant ou des temps dominants, traquer ceux-ci dans l’optique du commentaire offre au commentateur des pistes de lecture remarquables.

Ci-dessus, nous avons focalisé sur le verbe. Cependant, il faut avoir présent à l’esprit que le même travail d’investigation peut être fait avec chaque type de mot. Ce qui au bout du compte, nous aide à rapidement décortiquer le texte.  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cas pratique : Texte n°9[2]:Une vaillante guerrière[3]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

II-           LES PARTIES D’UN COMMENTAIRE

Les trois parties du commentaire sont : l’introduction, le développement et la conclusion. Aucune de ces trois parties ne doit faire défaut dans un devoir.

L’introductiondu commentaire suivi comporte une situation, une idée générale et un plan linéaire dans le temps où avec celle du commentaire composé, on parle de présentation du texte, de thème global et de centres d’intérêt (voire axes d’étude) en guise de plan.

Si on peut situer un texte par rapport à l’œuvre d’où il est extrait, à l’auteur, au contexte de production, au genre ou au mouvement littéraire, par contre présenter un texte nécessite un esprit de synthèse et un style laconique pour dire beaucoup en peu de mots.

Quant à l’idée générale dans le commentaire suivi, on l’a appelée, faute de mieux, dans le commentaire composé, thème global du texte.

Enfin, le plan du commentaire suivi suit l’enchaînement des idées de l’auteur ligne après ligne ou vers après vers. Ce qui n’est pas le cas du plan du commentaire composé qui fonctionne avec des axes de lecture.

En ce qui concerne le développement, il comporte au moins deux parties. Il est impératif cependant que chaque partie soit composée d’au moinsde deux paragraphes[4]. Il est aussi nécessaire de veiller à l’équilibre des parties du développement. 

La conclusion, elle, se compose de deux parties obligatoires et d’une facultative. D’abord, elle doit faire un résumé ou un bilan des idées essentielles du développement. Ensuite, elle opère un jugement esthétique du texte (originalité, beauté voire réussite). A ce niveau, elle s’arrête sur la manière d’écrire de l’auteur, la particularité de son style. Enfin, elle procède à un élargissement en comparant le texte à ceux du même auteur ou ceux d’autres auteurs. Il s’agit de s’interroger par rapport à la reprise ou à la modification du thème central du texte.

 

 

 

 

 

vLE COURS PRATIQUE

 

ØREDIGER UNE INTRODUCTION DE COMMENTAIRE

Exemple 1 :Texte n° 5

Gérard de Nerval ou Gérard Labrunie (1808-1855) malgré sa vie de bohème, son emprisonnement et ses troubles mentaux, a produit d’intéressantes œuvres littéraires. Parmi ces dernières, nous avons Odelettes rythmiques et lyriques (1852) dans lequel prend place « Une allée du Luxembourg ». Ce poème traite de l’amour fugace, éphémère ou impossible. Dans le développement qui va suivre, nous diviserons ce texte en trois parties : une apparition (premier quatrain), un coup de foudre (deuxième quatrain) et la désillusion (dernier quatrain). 

Exemple 2 : Texte n° 4

Le romantisme est l’expression des sentiments personnels et le refus des règles classiques ; il met en avant le cœur au détriment de la raison. C’est sous ce rapport qu’Alfred de Musset (1810- 1857) imagine dans son poème intitulé « Chanson » et extrait des Premières poésies(1830-1840) un dialogue entre sa raison et son cœur voire entre son moi et sa moitié. Pour mieux appréhender ce poème, nous l’étudierons à la lumière des centres d’intérêt suivants : la fidélité et l’infidélité. 

Exemple 3 : Texte n°6

Banni de la France par l’empereur Napoléon III et désormais confiné dans la souffrance et les privations, le leader romantique continue le combat. Pour lui, l’écriture est une arme mais aussi une thérapie. Dans cette perspective curative, il fait un travail de remémoration d’où le recueil autobiographique Les Contemplations(1856) et des poèmes d’hommage et de deuil comme « Trois ans après ». Dans ce poème, le chef de file du cénacle romantique dévoile ses sentiments de tristesse et de désespoir occasionnés par la disparition de deux êtres chers. Pour mieux étudier ce poème, nous l’ausculterons à travers un plan binaire : la première partie (les deux premiers quatrains) s’intitulerait la démission du poète et la deuxième (les deux dernières strophes), la double perte. 

 

 

 

 

 

Exemple 4 :Texte n° 3

Maître incontesté du romantisme, Victor Hugo (1802-1885) ne focalise pas uniquement sur les émois de son cœur, sur son propre moi. Il illustre à perfection le romantisme social en prenant en charge la femme, l’enfant et même la prostituée. C’est dans cette optique  que dans « Melancholia » extrait des Contemplations(1856), le pair de France cloue au pilori, avec la dernière énergie, l’exploitation éhontée des mineurs. Le commentaire suivi de ce poème pourrait se faire en deux parties : la première qui irait du début au vers six s’intitulerait la dénonciation du poète et la deuxième comprise entre le vers sept et la fin aurait comme titre les malédictions du poète. 

Exemple 5 :Texte n° 8

En déphasage d’avec les particularismes poétiques occidentaux, Senghor se veut un aède intégral. Il se réclame à la fois du vates et du poeta. C’est ce que semble confirmer cet extrait (« Que m’accompagnent kôras et balafong ») de Chants d’ombrequi met en évidence les choix multiples de la vie auxquels reste confronté le poète nègre. Pour mieux élucider ce poème, nous convoquerons deux centres d’intérêt à savoir le poète, une âme romantique et le poète, une « voix des sans-voix ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ØREDIGER UNE CONCLUSION DE COMMENTAIRE

 

Exemple 1 :Texte n° 5

En guise de conclusion, nous pouvons mentionner que le poète Nerval fait la description de sa bien-aimée mais en retour, cet amour semble irréalisable. Selon nous, Nerval rend captivant son texte en insistant sur les figures de comparaison. Cette odelette de Gérard Labrunie donne dans la même perspective que Sous l’oragede Seydou Badian en ce sens que nous nous retrouvons avec des amours unilatérales impossibles.

Exemple 2 :Texte n°3

En définitive, nous avons vu que le général du romantisme dénonce ce travail malsain mais lutte aussi contre la maltraitance et l’exploitation des enfants. En ce qui nous concerne, nous dirons que ce poème va de pair avec le lyrisme engagé. Il s’inscrit dans le même sillage que Les Misérables(roman d’Hugo) qui défend la femme, l’enfant et même la prostituée.

Exemple 3 :Texte n°3

En somme, nous pouvons avancer que le pair de France fait montre de son indignation et de sa réprobation vis-à-vis de l’exploitation des mineurs. Il nous semble que le poète recourt au présent d’actualité pour mieux sensibiliser ses concitoyens sur le travail des enfants[5].

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ØREDIGER UN PARAGRAPHE DU DEVELOPPEMENT D’UN COMMENTAIRE SUIVI 

 

#   Texte n°3

 

Exemple 1 :

Le poète critique l’exploitation des enfants. Celle-ci se fait à leur détriment. Ces mineurs sont dans un régime forcé et ils sont instrumentalisés. C’est ce qu’illustre la comparaison du vers trois (« Qui se sert d’un enfant ainsi d’un outil ») qui met en relief la dépersonnalisation de l’enfant.

Exemple 2 :

Le chef du romantisme pense que le progrès est le responsable de ce désastre. Il estime que faire travailler des enfants dans de telles conditions  n’est pas synonyme d’avancement ou de développement. Pour lui, ces jeunes âmes sont condamnées ici à être utilisées comme des machines. Ainsi, on assiste à une déshumanisation. C’est ce que certifient les vers cinq et six : « Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme, ∕ Une âme à la machine et la retire à l’homme ».

Exemple 3 :

Le poète qualifie ce travail comme étant quelque chose qui rabaisse l’homme. Un tel labeur prive l’homme de sa dignité et de son honneur. C’est pourquoi il profère des malédictions. C’est ce que confirment les vers dix et onze : « Ô Dieu ! qu’il soit maudit au nom du travail même, / Au nom du vrai travail, saint, fécond, généreux ».

Exemple 4 :

Le leader romantique déverse sa colère en faisant des invocations. Il montre que ce travail est nuisible à la jeunesse. Se faisant, il met en relief leur maltraitance. Aussi, appelle-t-il la malédiction de Dieu sur un tel travail : « Que ce travail, haï des mères, soit maudit. »

Exemple 5 :

L’amant de Juliette Drouet condamne l’exploitation abusive des enfants. Il blâme leur torture morale et physique. Il nous montre que ces enfants sont réduits en esclavage. C’est ce que corrobore l’anaphore « Maudit » qui met en exergue le mécontentement et la colère du poète.

 

 

ØREDIGER UN PARAGRAPHE DU DEVELOPPEMENT D’UN COMMENTAIRE COMPOSE

 

Exemple 1 :

 

Exemple 2 :

 

Exemple 3 :

 

Exemple 4 :

 

Exemple 5 :


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ø  ETUDE DE CAS PRATIQUES

Cas pratique : Texte n°3:

Travail mauvais qui prend l’âge tendre en sa serre,

Qui produit la richesse en créant la misère,

Qui se sert d’un enfant ainsi que d’un outil !

Progrès dont on se demande : « Où va-t-il ? Que veut-il ? »

Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,

Une âme à la machine et la retire à l’homme !

Que ce travail, haï des mères, soit maudit !

Maudit comme le vice où l’on s’abâtardit,

Maudit comme l’opprobre et comme le blasphème !

Ô Dieu ! qu’il soit maudit au nom du travail même,

Au nom du vrai travail, saint, fécond, généreux,

Qui fait le peuple libre et qui rend l’homme heureux !

Victor HUGO, « Melancholia »in : Les Contemplations(1856), III, 2.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cas pratique : Texte n°1:   Quelques paragraphes du développement

 

Le leader romantique dévoile ses sentiments de tristesse. Il fait ses adieux à la France. Il montre sa souffrance de devoir quitter le pays de ses ancêtres. C’est ce que certifient les vers trois et quatre : « Je ne reverrai pas ta terre douce et triste, / Tombeau de mes aïeux et nid de mes amours ! »

 

L’alpha et l’oméga du romantisme met l’accent sur sa détermination. Il défend son pays. Il est si engagé qu’il est prêt à être le seul ennemi de l’empereur Napoléon III. C’est ce qu’affirment les vers quinze et seize : « S’il en demeure dix, je serai le dixième ; / Et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là ! » 

 

Le général en chef du romantisme assume son exil. Il est prêt à endurer toutes les peines et toutes les souffrances qui l’accompagnent. Il est décidé à boire le calice jusqu’à la lie. C’est pourquoi il mentionne dans l’avant-dernière strophe : « J’accepte l’âpre exil, n’eût-il ni fin ni terme / Sans chercher à savoir et sans considérer / Si quelqu’un a plié qu’on aurait cru plus ferme ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cas pratique : Texte n°6 :  Quelques paragraphes du développement

 

Le poète exprime ses sentiments de tristesse et de désespoir. Il regrette la disparition de deux êtres chers. Il désire mourir car sa souffrance est immense. Seule la mort l’intéresse : « Ne me parlez pas d’autre chose / Que des ténèbres où l’on dort. »

 

Le leader romantique montre son désespoir et sa souffrance. Il est dans la démission. Il ne comprend pas les différentes interpellations ou sollicitations. Il veut se retirer du monde  d’où sa quête d’un « peu de silence et de paix ».

 

L’alpha et l’oméga du romantisme expose sa mélancolie. Il a même perdu la joie de vivre. Il ne veut entendre que des paroles qui renvoient à la mort. Dans son for intérieur, il se sent terrassé et abattu. Tout ce qu’il désire, ce n’est que du « silence et de la paix ». 

 

L’amant de Juliette Drouet regrette la mort de sa mère et de sa fille. Il éprouve des sentiments de malheur. Il pense qu’il n’est pas épargné par le sort. C’est ce que corrobore exactement le dernier quatrain.

 

L’ancien souteneur de Napoléon III éprouve une profonde nostalgie pour sa terre natale. Celle-ci est un objet de désir pour lui. Son attachement et son amour pour elle  sont si grands qu’il use de l’apostrophe et de la personnification en même temps. C’est ce que confirment les vers cinq et six : « Je ne reverrai pas ta rive qui nous tente, / France ! hors le devoir, hélàs ! / j’oublîrai tout. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

Cas pratique : Texte n°4 :  Deux paragraphes du développement et deux conclusions

Le poète fait un dialogue avec son cœur. Il lui montre l’importance de la fidélité. Il pense que c’est la seule chose qui peut lui garantir le bonheur. C’est ce qu’affirment les vers trois et quatre : « Et ne vois-tu pas que changer sans cesse, / C’est perdre en désirs le temps du bonheur ? »

L’amant de George Sand dévoile ses sentiments personnels sur la fidélité. Il ne croit qu’en un seul amour. Il lui est fortement dévoué. C’est ce que certifient les deux premiers vers du poème : « J’ai dit à mon cœur, à mon faible cœur / N’est-ce point assez d’aimer sa maîtresse ? »

 

En guise de bilan, l’on pourrait remarquer qu’Alfred de Musset aimerait être fidèle mais son cœur n’est pas de cet avis. Ce texte est original en ce sens que l’amant de George Sand mélange dans le même moule les dimensions poétique, dialogale et argumentative. Elle donne dans la même perspective que Phèdrede Jean Racine dont le personnage éponyme est confronté à la même situation qu’Alfred Musset.

En somme, nous pouvons remarquer que le chantre de l’amour expose sa fidélité et l’infidélité de sa maîtresse. Il semble que l’originalité du lieutenant de Victor Hugo réside dans sa capacité à discuter avec lui-même, avec son amour à travers un poème dialogal.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cas pratique : Texte N°14 :Une ville coloniale1[6]



ØL’ECHANTILLON


Texte n° 3:

Travail mauvais qui prend l’âge tendre en sa serre,

Qui produit la richesse en créant la misère,

Qui se sert d’un enfant ainsi que d’un outil !

Progrès dont on se demande : « Où va-t-il ? Que veut-il ? »

Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,

Une âme à la machine et la retire à l’homme !

Que ce travail, haï des mères, soit maudit !

Maudit comme le vice où l’on s’abâtardit,

Maudit comme l’opprobre et comme le blasphème !

Ô Dieu ! qu’il soit maudit au nom du travail même,

Au nom du vrai travail, saint, fécond, généreux,

Qui fait le peuple libre et qui rend l’homme heureux !

Victor HUGO, « Melancholia » in : Les Contemplations(1856), III, 2.

 

Texte n° 4:

J’ai dit à mon cœur, à mon faible cœur :

N’est-ce point assez d’aimer sa maîtresse ?

Et ne vois-tu pas que changer sans cesse,

C’est perdre en désirs le temps du bonheur ?

 

Il m’a répondu : ce n’est point assez,

Ce n’est point assez d’aimer sa maîtresse ;

Et ne vois-tu pas que changer sans cesse,

Nous rend doux et chers les plaisirs passés ?

 

J’ai dit à mon cœur, à mon faible cœur :

N’est-ce point assez de tant de tristesse ?

Et ne vois-tu pas que changer sans cesse,

C’est à chaque pas trouver la douleur ?

 

Il m’a répondu : ce n’est point assez,

Ce n’est point assez de tant de tristesse.

Et ne vois-tu pas que changer sans cesse,

Nous rend doux et chers les chagrins passés ?

Alfred de Musset. « Chanson » In : Premières poésies. 1830-1840.

 

Texte n° 5:Une allée du Luxembourg

Elle a passé, la jeune fille

Vive et preste comme un oiseau :

A la main une fleur qui brille,

A la bouche un refrain nouveau.

 

C’est peut-être la seule au monde

Dont le cœur au mien répondrait, 

Qui venant dans ma nuit profonde

D’un seul regard l’éclaircirait !

 

Mais non, − ma jeunesse est finie… 

Adieu, doux rayon – qui m’as lui, −

Parfum, jeune fille, harmonie…

Le bonheur passait, − il a fui !

Gérard De Nerval. Odelettes rythmiques et lyriques, 1852.

 

Texte n° 6:Trois ans après

Il est temps que je me repose ;

Je suis terrassé par le sort.

Ne me parlez pas d’autre chose

Que des ténèbres où l’on dort ! 

 

Que veut-on que je recommence ?

Je ne demande désormais

A la création immense

Qu’un peu de silence et de paix !

 

 A vingt ans, deuil et solitude !

Mes yeux, baissés vers le gazon,

Perdirent la douce habitude

De voir ma mère à la maison.

 

Elle nous quitta pour la tombe ;

Et vous savez bien qu’aujourd’hui

Je cherche, en cette nuit qui tombe,

Un autre ange qui s’est enfui !

Victor Hugo, Les Contemplations, 1856.

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Texte n° 7 :Neige sur Paris


Seigneur, vous avez visité Paris par ce jour de votre

  naissance

Parce qu’il devenait mesquin et mauvais

Vous l’avez purifié par le froid incorruptible

Par la mort blanche.

Ce matin, jusqu’aux cheminées d’usine qui chantent à 

  l’unisson

Arborant des draps blancs

  « Paix aux Hommes de bonne volonté ! »

 

Seigneur, vous avez proposé la neige de votre Paix au

  monde divisé à l’Europe divisée

A l’Espagne déchirée

Et le rebelle juif et catholique a tiré ses 1.400 canons

  contre les montagnes de votre Paix.

Seigneur, j’ai accepté votre froid blanc qui brûle plus

  que le sel.

Voici que mon cœur fond comme neige sous le soleil.

J’oublie

Les mains blanches qui tirèrent les coups de fusils qui

  croulèrent les empires

Les mains qui flagellèrent les esclaves, qui vous 

  flagellèrent

 

 

 

 

 

Les mains blanches poudreuses qui vous giflèrent, les 

  mains peintes poudrées qui m’ont giflé 

Les mains sûres qui m’ont livré à la solitude à la haine

Les mains blanches qui abattirent la forêt de rôniers

  qui dominait l’Afrique, au centre de l’Afrique

Droits et durs, les Saras beaux comme les premiers 

  hommes qui sortirent de vos mains brunes.

Elles abattirent la forêt noire pour en faire des traverses 

  de chemin de fer

Elles abattirent les forêts d’Afrique pour sauver la

  Civilisation, pace qu’on manquait de matière pre-

  mière humaine.

 

Seigneur, je ne sortirai pas ma réserve de haine, je le

  sais, pour les diplomates qui montrent leurs canines 

  longues

Et qui demain troqueront la chair noire.

Mon cœur, Seigneur, s’est fondu comme neige sur

  les toits de Paris

Au soleil de votre douceur.

Il est doux à mes ennemis, à mes frères aux mains

  blanches sans neige

A cause aussi des mains de rosée, le soir, le long de mes

  joues brûlantes.

 

Léopold  Sédar Senghor.  Chants d’ombre, 1945.


Texte n° 8 :Que m’accompagnent kôras et balafong

                                         Entendez tambour qui bat !

                                                                                         Maman qui m’appelle.

                                                                                         Elle m’a dit Toubab !

                                                                                         D’embrasser la plus belle.


Elle m’a dit « Seigneur » !

Choisir ! et délicieusement écartelé entre ces deux mains

  amies

  Un baiser de toi Soukeîna ! – ces deux mondes

  antagonistes

Quand douloureusement – ah ! je ne sais plus qui est

  ma sœur et qui ma sœur de lait

De celles qui bercèrent mes nuits de leur tendresse

  rêvée, de leurs mains mêlées

Quand douloureusement – un baiser de toi Isabelle ! –

  entre ces deux mains

Que je voudrais unir dans ma main chaude de nouveau.

Mais s’il faut choisir à l’heure de l’épreuve

J’ai choisi le verset des fleuves, des vents et des forêts

L’assonance des plaines et des rivières, choisi le rythme

  de sang de mon corps dépouillé

Choisi la trémulsion des balafongs et l’accord des cordes

  et des cuivres qui semble faux, choisi le

Swing le swing oui le swing !

Et la lointaine trompette bouchée, comme une plainte

  de nébuleuse en dérive dans la nuit

Comme l’appel du Jugement, trompette éclatante sur

  les charniers neigeux d’Europe. 

J’ai choisi mon peuple noir peinant, mon peuple paysan,

  toute la race paysanne par le monde.

« Et tes frères se sont irrités contre toi, ils t’ont mis à

  bêcher la terre. »

Pour être ta trompette !


 

 Léopold Sédar Senghor.  Chants d’ombre, 1945.

 

 

 

 

 

 

 

Texte n° 9 :Une vaillante guerrière[7]

Un soldat sauta on ne sait d’où sur la scène. Trapu, le coup plein, les fossettes et la lèvre inférieure proéminentes, le visage mâle, rien ne révélait en lui tout d’abord aux Dahoménous que c’était un être à sept paires de côtes. Elle portait une culotte nommée « oreille de chien » à cause d’un petit coin d’étoffe taillé sur le modèle de l’oreille de ce carnassier et cousu au jarret du vêtement. Un grand mouchoir plié en deux lui recouvrait la poitrine et était noué sur le dos pour aplatir les seins et donner ainsi à sa forme une apparence virile ; un gilet sans manche, par-dessus lequel était ceinte une giberne, y aidait. Une sorte de béguin fendu devant et derrière avec un rebord en pointe sur chaque côté, cachait les trous percés dans les lobes des oreilles puis agrandis et qui auraient pu révéler le sexe faible.

La main gauche à la hanche, le pouce sur le rein et les quatre doigts sur le bas-ventre, les yeux étincelants, elle dit se nommer Ganwoumé et parlait d’une voix mâle en appuyant ses paroles de coups forts résonnants sur la poitrine qu’elle frappait du bout du faisceau des cinq doigts de sa main droite ; elle s’engageait pour elle et pour toutes ses sœurs d’armes qui trouvaient, disait-elle, anodins les supplices proposés par quelques soldats pour châtier leur défaite.

« Si nous ne vainquons pas, que Migan nous attache une à une à la bouche de chaque caronade du Maître du monde et la fasse tonner pour qu’on ne retrouve plus rien de nous ! » Pour démontrer qu’elle ne disait pas une fanfaronnade, elle lança son fusil en l’air et le reçut entre ses mâchoires qui le serraient au milieu comme des pinces ; elle allait et venait, les mains aux hanches, promenant l’arme devant les regards émerveillés de la foule. Quelqu’un signala qu’elle était de l’armée : « Egbélémakou » (Que je ne survive pas à la défaite !)

Le roi sourit, plein de confiance. Les Danhoménous déliraient : « Tu es plus brave qu’un homme ! Tu as donné un aperçu de la volonté de vaincre de ton corps d’armée ! Une poignée de guerrières de ton courage suffirait à conquérir tous les pays ennemis du Danhomé ! »

Guézo lui fit remettre un pagne et dix filières de cauris puis décida qu’elle serait adjointe désormais à la guerrière commandant la brigade de l’armée des femmes et lui promit d’autres récompenses pour le retour de la guerre si sa conduite se conformait là-bas à ses paroles...

 

Paul Hazoumé. Doguicimi. Edition Larose.    

Texte n° 10 :Un tableau de la colonisation[8]

     Donne-lui vingt-cinq coups de chicotte, dit Gosier-d’Oiseau au garde quand nous fûmes revenus au camp des gardes.

         Je m’étendis à plat ventre devant le garde. Gosier-d’oiseau lui tendit le nerf d’hippopotame qu’il ne quitte jamais. Le garde le fit siffler vingt-cinq fois sur mes fesses. Au début je ne voulais pas crier. Il ne fallait pas que je crie. Je serrais les dents tout en m’efforçant de penser à autre chose. L’image de Kalisia se présenta devant mes yeux. Celle de Madame lui succéda, puis celle de mon père… Tous les évènements de la journée défilèrent devant mes yeux…

           Derrière mon dos, Mendim s’essoufflait.

     Crie, bon Dieu ! Mais crie donc ! gueulait-il dans notre langue, ils ne me diront jamais d’arrêter tant que tu ne crieras pas…

          Le garde compta vingt-cinq puis se retourna vers les Blancs.

     Passe-moi la chicotte, dit Gosier-d’Oiseau.

          Il fit siffler le nerf d’hippopotame sur le dos du garde qui poussa un barrissement de douleur.

     Là ! c’est comme ça qu’il faut frapper ! Recommence !

          Mendim retroussa les manches de sa veste kaki, les lèvres tordues de douleur.

     Crie ! Crie donc ! pleurait-il en s’acharnant sur moi, as-tu de la merde dans les oreilles ?

     Ta gueule ! lui cria l’amant de Sophie en me décochant un coup de pied sous le menton. Stop ! Stop… Stop ! ajouta-t-il.

          Mendim s’arrêta.

     Demain, rien à manger… compris ? dit Gosier-d’Oiseau en me retournant du pied. Tu me l’amèneras au bureau après-demain. Chicotte toute la journée… Compris ?

     Oui, chef, dit le garde.

          Les Blancs s’en allèrent.

          Je ne pouvais vraiment pas prévoir que je passerais la nuit dans la case de Mendim me Tit. Il somnole devant moi, la bouche ouverte, tassé dans un vieux fauteuil comme un vieux pardessus.

     Je crois que j’ai fait aujourd’hui quelque chose que je ne pourrai jamais oublier ni expier… m’a-t-il dit quand les Blancs furent partis.

          Ses gros yeux se voilèrent de larmes.

     Pauvre Toundi ! Pauvres de nous… gémissait-il.

Ferdinand Oyono. Une vie de boy, Paris, Julliard, 1956, pp. 170 et 171.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Texte n° 11 :Le Chêne et le roseau

Le Chêne un jour dit au Roseau : 
Vous avez bien sujet d’accuser la Nature.
Un Roitelet pour vous est un pesant fardeau.
Le moindre vent qui d’aventure
Fait rider la face de l’eau
Vous oblige à baisser la tête : 
Cependant que mon front au Caucase pareil,
Non content d’arrêter les rayons du Soleil,
Brave l’effort de la tempête.
Tout vous est Aquilon ; tout me semble Zéphyr.
Encor si vous naissiez à l’abri du feuillage
Dont je couvre le voisinage ; 
Vous n’auriez pas tant à souffrir ; 
Je vous défendrais de l’orage : 
Mais vous naissez le plus souvent
Sur les humides bords des Royaumes du vent.
La Nature envers vous me semble bien injuste.
Votre compassion, lui répondit l’Arbuste, 
Part d’un bon naturel ; mais quittez ce souci.
Les vents me sont moins qu’à vous redoutables.
Je plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu’ici
Contre leurs coups épouvantables
Résisté sans courber le dos : 
Mais attendons la fin. Comme il disait ces mots,
Du bout de l’horizon accourt avec furie
Le plus terrible des enfants
Que le Nord eût porté jusque-là dans ses flancs.
L’Arbre tient bon, le Roseau plie ; 
Le vent redouble ses efforts, 
Et fait si bien qu’il déracine
Celui de qui la tête au Ciel était voisine, 
Et dont les pieds touchaient à l’Empire des Morts.

Jean de La Fontaine. Les Fables, 1668.

 

 

Texte n° 12 :L’école des Blancs[9] 

L’assistance demeurait immobile, comme pétrifiée. La Grande Royale seule bougeait. Elle était, au centre de l’assistance, comme la graine dans la gousse.

-       L’école où je pousse nos enfants tuera en eux ce qu’aujourd’hui nous aimons et conservons avec soin, à juste titre. Peut-être notre souvenir lui-même mourra-t-il en eux. Quand ils nous reviendront de l’école, il en est qui ne nous reconnaîtront pas. Ce que je propose c’est que nous acceptions de mourir en nos enfants et que les étrangers qui nous ont défaits prennent en eux toute la place que nous aurons laissée libre.

Elle se tut encore, bien qu’aucun murmure ne l’eût interrompue. Samba Diallo perçut qu’on reniflait près de lui. Il leva la tête et vit deux grosses larmes couler le long du rude visage du maître des forgerons.

-       Mais, gens des Diallobé, souvenez-vous de nos champs quand approche la saison des pluies. Nous aimons bien nos champs, mais que faisons-nous alors ? Nous y mettons le fer et le feu, nous les tuons. De même, souvenez-vous : que faisons-nous de nos réserves de graines quand il a plu ? Nous voudrions bien les manger, mais nous les enfouissons en terre.

« La tornade qui annonce le grand hivernage de notre peuple est arrivée avec les étrangers, gens des Diallobé. Mon avis à moi, Grande Royale, c’est que nos meilleures graines et nos champs les plus chers, ce sont nos enfants. Quelqu’un veut-il parler ? »  

Nul ne répondit.

-       Alors, la paix soit avec vous, gens des Diallobé, conclut la Grande Royale. 

Cheikh Hamidou Kane. L’Aventure ambiguë, 1961.

 

 

 

 

 

 

 

Texte n° 13 :L’Ouragan

L’ouragan arrache tout autour de moi

Et l’ouragan arrache en moi feuilles et paroles futiles.

Des tourbillons de passion sifflent en silence

Mais paix sur la tornade sèche, sur la fuite de l’hivernage !

 

Toi Vent ardent Vent pur, Vent-de-belle-saison, brûle

     toute fleur toute pensée vaine

Quand retombe le sable sur les dunes du cœur. 

Servante, suspends ton geste de statue et vous, enfants,

    vos jeux et vos rires d’ivoire.

Toi, qu’elle consume ta voix avec ton corps, qu’elle

    sèche le parfum de ta chair 

La flamme qui illumine ma nuit, comme une colonne

       et comme une palme.

Embrase mes lèvres de sang, Esprit, souffle sur les

       cordes de ma kôra

Que s’élève mon chant, aussi pur que l’or de Galam.

Léopold Sédar Senghor. Chants d’ombre, 1945.

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Texte n° 14 :Une ville coloniale

Le jour, le Tanga du versant sud, Tanga commercial, Tanga de l’argent et du travail lucratif, vidait l’autre Tanga de sa substance humaine. Les Noirs remplissaient le Tanga des autres, où ils s’acquittaient de leurs fonctions. Manœuvres, petits commerçants, cuisiniers, boys, marmitons, prostituées, fonctionnaires, subalternes, rabatteurs, escrocs, oisifs, main-d’œuvre pénale, les rues en fourmillaient. Chaque matin, les paysans de la forêt proche venaient grossir leurs rangs, soit qu’ils fussent simplement en quête de plus vastes horizons, soit qu’ils vinssent écouler le produit de leur travail ; il s’était constitué parmi cette population une mentalité spécifique, si contagieuse que les hommes qui venaient périodiquement de la forêt en restaient contaminés aussi longtemps qu’ils séjournaient à Tanga. Comme les gens de la forêt éloignée qui conservaient leur authenticité, les habitants de Tanga étaient veules, vains, trop gais, trop sensibles. Mais en plus, il y avait quelque chose d’original en eux maintenant : un certain penchant pour le calcul mesquin, pour la nervosité, l’alcoolisme et tout ce qui excite le mépris de la vie humaine – comme dans tous les pays où se disputent de grands intérêts matériels. C’était la ville de chez nous qui détenait le record des meurtres… et des suicides.   

         La nuit, la vie changeait de quartier général. Le Tanga du versant nord récupérait les siens et s’animait alors d’une effervescence incroyable. Il faisait fête chaque nuit à ses enfants prodigues. On eût dit qu’il aurait voulu les abreuver d’une chose qu’ils perdraient peut-être bientôt pour toujours : la joie, la vraie joie, la joie sans maquillage, la joie nue, la joie originelle. Mais cela, ils ne pouvaient pas le comprendre. Déjà ils ne pouvaient plus dire d’où ils venaient qu’en nommant leur village natal, leur tribu d’origine. Ils ne savaient pas non plus où ils allaient, ni pourquoi ils y allaient. Etonnés de se trouver si nombreux ensemble, ils étaient non moins étonnés de cet étrange isolement de forêt vierge où ils se sentaient individuellement.

         Dans Tanga-Nord, une case sur cinq tenait lieu de débit de boissons : le vin rouge généralement mélangé de mauvaise eau, le vin de palme souvent mal conservé, la bière de maïs, ce qu’il y avait de meilleur, y coulaient à profusion. Les initiés savaient en outre où et comment se procurer de l’africa-gin, une fameuse boisson locale, très fortement alcoolisée. […] Les maisons de danse exerçaient une attirance irrésistible sur les habitants des deux sexes. Violemment éclairées à l’électricité, bruyantes, mélodieuses et plus souvent cacophoniques, tambourinantes, pleines d’une faune singulière – engoncée dans des faux cols ou fagotée dans des robes et des jupes de mauvaise coupe […] – elles coûtaient par bonheur trop cher. Aussi était-il commun de se rassembler à deux, à trois ou davantage, dans une case, autour d’une calebasse de vin, de battre sur des caisses vides à défaut de tam-tam […], d’improviser un bal où la fantaisie était la règle prédominante, malgré l’exiguïté du local.

Eza Boto. Ville cruelle. 1954.

Texte n° 15 :Incipit de L’Etranger

         Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J’ai reçu un télégramme de l’asile : « Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués. » Cela ne veut rien dire. C’était peut-être hier. L’asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d’Alger. Je prendrai l’autobus à deux heures et j’arriverai dans l’après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J’ai demandé deux jours de congé à mon patron et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse pareille. Mais il n’avait pas l’air content. Je lui ai même dit : « Ce n’est pas de ma faute. » Il n’a pas répondu. J’ai pensé alors que je n’aurai pas dû lui dire cela. En somme, je n’avais pas à m’excuser. C’était plutôt à lui de me présenter ses condoléances. Mais il le fera sans doute après-demain, quand il me verra en deuil. Pour le moment, c’est un peu comme si maman n’était pas morte. Après l’enterrement, au contraire, ce sera une affaire classée et tout aura revêtu une allure plus officielle.

         J’ai pris l’autobus à deux heures. Il faisait très chaud. J’ai mangé au restaurant, chez Céleste, comme d’habitude. Ils avaient tous beaucoup de peine pour moi et Céleste m’a dit : « On n’a qu’une mère. » Quand je suis parti, ils m’ont accompagné à la porte. J’étais un peu étourdi parce qu’il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois. 

Albert Camus. L’Etranger, 1942.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Texte n° 16 :Excipit de L’Etranger

[…] j'ai retrouvé le calme. J'étais épuisé et je me suis jeté sur ma couchette. Je crois que j'ai dormi parce que je me suis réveillé avec des étoiles sur le visage. Des bruits de campagne montaient jusqu'à moi. Des odeurs de nuit, de terre et de sel rafraîchissaient mes tempes. La merveilleuse paix de cet été endormi entrait en moi comme une marée. À ce moment, et à la limite de la nuit, des sirènes ont hurlé. Elles annonçaient des départs pour un monde qui maintenant m'était à jamais indifférent. Pour la première fois depuis bien longtemps, j'ai pensé à maman. Il m'a semblé que je comprenais pourquoi à la fin d'une vie elle avait pris un « fiancé », pourquoi elle avait joué à recommencer. Là-bas, là-bas aussi, autour de cet asile où des vies s'éteignaient, le soir était comme une trêve mélancolique. Si près de la mort, maman devait s'y sentir libérée et prête à tout revivre. Personne, personne n'avait le droit de pleurer sur elle. Et moi aussi, je me suis senti prêt à tout revivre. Comme si cette grande colère m'avait purgé du mal, vidé d'espoir, devant cette nuit chargée de signes et d'étoiles, je m'ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l'éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin, j'ai senti que j'avais été heureux, et que je l'étais encore. Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu'il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine.

Albert Camus. L’Etranger, 1942.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Texte n° 17 :Un symbole de la dictature[10]

 

         Comment s’appelait ce camp ? Il ne possédait pas de nom, puisque les geôliers eux-mêmes ne le savaient pas. Et c’était bien ainsi. Les choses qui ne peuvent pas être dites ne méritent pas de noms et ce camp ne saura jamais être dit.

         D’abord on y perdait la notion de la durée. Un matin, on comptait qu’on y avait vécu depuis des années ; le soir on trouvait qu’on y était arrivé depuis des semaines seulement. Et cela parce qu’on y débarquait, toujours presque mourant, l’esprit rempli de cauchemars, les yeux clos, les oreilles sourdes. Puis on y passait des jours plus longs que des mois, et des saisons plus courtes que des semaines. En pleine nuit le soleil éclairait ; en plein jour la lune apparaissait. On ne réussissait pas à dormir la nuit, et toute la journée on titubait, ivre de sommeil.

         En outre, Fama n’a jamais su dans quelle région de la république des Ebènes le camp était situé.

         Il lui parut d’abord que c’était en savane, dans les lointaines et sauvages montagnes du Hougon, parce que des monts empêchaient d’y voir les levers et les couchers du soleil. Mais ce n’était pas en savane : les saisons étaient celles de la zone forestière, l’harmattan bref avec d’insignifiants incendies illuminant les horizons pendant deux ou trois nuits. L’hivernage était celui de la forêt ; il tombait interminable et lourd ; les vents, les orages et les tonnerres occupaient continuellement les nuits et les jours, s’enrageaient, s’entre-déchiraient, et perpétuellement l’univers restait embrasé. Mais quand il constata que la flore et la faune étaient en partie celles de la côte, Fama pensa que le camp avait été construit dans une île ou presqu’île au milieu des lagunes. Car les mouches tsé-tsé et les moustiques harcelaient sans cesse ; et l’air moite des lagunes pénétrait dans le corps par les trous de leurs piqûres et les détenus se gonflaient comme si chacun était atteint par un double éléphantiasis et un triple béribéri. Dans les eaux stagnantes environnantes nageaient et coassaient de lourds crapauds aux couleurs vives, et parfois, des nénuphars, émergeaient des crocodiles géants qui venaient se fracasser et se suicider sur les clôtures quand les gardes ne les abattaient pas. Les soirs, Fama hésitait. Ce n’était pas en zone lagunaire, parce qu’on y entendait le bubulement des oiseaux de la savane, le jappement des singes, le rugissement des lions et le silence qui suit et respecte ce rugissement dans le profond de la nuit.

Ahmadou Kourouma. Les Soleils des indépendances, 1968.

 

 

 

Texte n° 18 :L’illusion des indépendances 

Comme une nuée de sauterelles les Indépendances tombèrent sur l’Afrique à la suite des soleils de la politique. Fama avait comme le petit rat de marigot creusé le trou pour le serpent avaleur de rats, ses efforts étaient devenus la cause de sa perte car comme la feuille avec laquelle on a fini de se torcher, les indépendances une fois acquises, Fama fut oublié et jeté aux mouches. Passaient encore les postes de ministres, de députés, d’ambassadeurs, pour lesquels lire et écrire n’est pas aussi futile que des bagues pour un lépreux. On avait pour ceux-là des prétextes de l’écarter, Fama demeurant analphabète comme la queue d’un âne. Mais quand l’Afrique découvrit d’abord le parti unique (le parti unique, le savez-vous ? ressemble à une société de sorcières, les grandes initiées dévorent les enfants des autres), puis les coopératives qui cassèrent le commerce, il y avait quatre-vingts occasions de contenter et de dédommager Fama qui voulait être secrétaire général d’une sous-section du parti ou directeur d’une coopérative. Que n’a-t-il pas fait pour être coopté ? Prier Allah nuit et jour, tuer des sacrifices de toutes sortes, même un chat noir dans un puits ; et ça se justifiait ! Les deux plus viandés et gras morceaux des Indépendances sont sûrement le secrétariat général et la direction d’une coopérative… Le secrétaire général et le directeur, tant qu’ils savent dire les louanges du président, du chef unique et de son parti, le parti unique, peuvent bien engouffrer tout l’argent du monde sans qu’un seul œil ose ciller dans toute l’Afrique.

         Mais alors, qu’apportèrent les Indépendances à Fama ? Rien que la carte d’identité nationale et celle du parti unique. Elles sont les morceaux du pauvre dans le partage et ont la sécheresse et la dureté de la chair du taureau. Il peut tirer dessus avec les canines d’un molosse affamé, rien à en tirer, rien à sucer, c’est du nerf, ça ne se mâche pas. Alors comme il ne peut pas repartir à la terre parce que trop âgé (le sol du Horodougou est dur et ne se laisse tourner que par des bras solides et des reins souples), il ne lui reste qu’à attendre la poignée de riz de la providence d’Allah en priant le Bienfaiteur miséricordieux, parce que tant qu’Allah résidera dans le firmament, même tous conjurés, tous les fils d’esclaves, le parti unique, le chef unique, jamais ils ne réussiront à faire crever Fama de faim.

           Ahmadou Kourouma. Les Soleils des indépendances, 1968.

 

 

 

 

 

 

Texte n° 19 :Une tentative de viol[11]

             Approche ! murmura le marabout. 

Elle recula. Comme un  boa, lui se tordit, se balança et amorça un sourire. Elle regardait et du fond de son intérieur montèrent comme un appel lointain les vapeurs de l’excision et du viol, et tout changea ; les yeux du marabout tournèrent, et sortirent les feux de la sauvagerie de Tiécoura ; les narines s’aplatirent et atteignirent à l’horreur des narines de Tiécoura.

             Pourquoi ? Pourquoi hésiter ? ta main ! ta main ici, ajouta-t-il.

Elle, s’essoufflait, se crispait.

Dehors donnaient le vent et la pluie. Rien ne pouvait surprendre. Mais sur elle bondissaient et se fracassaient les souvenirs. Souriante, fière, elle avait marché à l’excision, au champ de l’excision. Malmenée par la douleur elle avait rencontré le malheur, versé le sang comme celui du coq, la douleur, le fumet des sacrifices et des adorations, et enfin Abdoulaye le marabout en face d’elle. Elle le fixa : pas de doute. Au cou montaient les carcans de Tiécoura et le boubou prenait la couleur de l’habit de Tiécoura.

             Approche ! Approche !

Il ne comprenait et n’entendait qu’une seule chose : lui et la femme étaient seuls. Il ne voyait qu’une femelle brillante, ronde, hésitante mais soumise, et ne connaissant que le désir qui l’agitait et le chauffait. Il tira à arracher le pagne. 

             Laisse-moi, ou je crie !

Il sourit. Non ! Elle ne voudra pas crier ; et il s’accrocha et tira plus fort ; la femme fut projetée, dispersée et ouverte sur le lit ; il ne restait qu’à sauter dessus. Il ne le put ; car elle hurla la rage et la fureur et se redressa frénétique, possédée, arracha, ramassa un tabouret, un sortilège, une calebasse, en bombarda le marabout effrayé qui courait et criait « A cause d’Allah ! à cause d’Allah ! » Le couteau à tête recourbée traînait ; elle s’en arma, le poursuivit et l’accula entre le lit et les valises. Dans les yeux de Salimata éclatèrent le viol, le sang et Tiécoura, et sa poitrine se gonfla de la colère et de la vengeance. Et la lame recourbée frappa dans l’épaule gauche. L’homme à son tour hurla le fauve, gronda le tonnerre.

           Ahmadou Kourouma. Les Soleils des indépendances, 1968.

 

 

 

 

 

 

Texte n° 20 :Demain, dès l’aube[12]

Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,

Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.

J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.

Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

 

Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,

Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,

Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,

Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

 

Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,

Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,

Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe

Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

Victor Hugo, Les Contemplations, 1856.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ØDES PROPOSITIONS DE CENTRES D’INTERÊT

L’adage dit que c’est en forgeant qu’on devient forgeron. Certes, nous offrons ici des centres d’intérêt pour faire le commentaire composé des différents textes de notre échantillon. Il appartient à chaque élève, apprenant ou candidat de se les approprier. Il ne s’agit pas de lire le document à moult reprises. Cela ne suffit pas ! Il n’est pas question d’apprendre par cœur des passages du livre pour pouvoir faire du copier-coller dans les futures évaluations ! Cela ne suffit pas ! 

Cet ouvrage, il est vrai, vous offre de la nourriture spirituelle ou du grain à moudre sur la méthodologie du commentaire. Pour parvenir à la maîtrise d’un tel exercice, il faut simplement S’EXERCER. Sur une quinzaine de textes, si vous parvenez à faire cinq devoirs de commentaire, au choix, sans tricher avec vous-même, vous serez prêt et bien armé pour le commentaire au baccalauréat de français.

Si on vous exhorte à L’EXERCICEdu commentaire, ce n’est pas seulement pour la maîtrise mais c’est surtout parce qu’on sait que l’art du commentaire est un gage sûr de la bonne compréhension des richesses d’une langue. Ce qui par voie de conséquence déteint forcément sur les performances de l’apprenant lorsqu’il s’attaque aux autres méthodologies que sont la dissertation et le résumé.

Enfin, vous aurez remarqué que nous avons parlé d’exercice du commentaire et d’art du commentaire. Dans la vie de tous les jours, l’artiste, c’est celui qui est inspiré, qui fonctionne à l’intuition ou qui est assisté par un esprit voire qui doit tout à ce dernier. Cependant, nous tenons à insister ici sur le fait que l’exercice précède l’art. C’est à force d’exercices que l’on deviendra un bon commentateur, un artiste du commentaire.  

Nous vous proposons donc, dans le tableau suivant, pour chaque texte de notre corpus des centres d’interêt. Libre à vous de vous les approprier et de travailler en conséquence. Il est évident que si l’apprenant est sûr de ses compétences ou bien est devenu expert, il peut se trouver d’autres centres d’intérêt. Cela est notre vœu le plus cher pour ceux qui travaillent avec ce livre sans chercher à faire dans la facilité.

 

 

 

 

 

TEXTES

CENTRES D’INTERÊT

Texte 1 : Ultima verba

-       La patrie au cœur ;

-       Le cœur du poète.

Texte 2 : Mors

   Une configuration actantielle ;

   Une configuration dramatique ; 

   Une configuration tragique.

Texte 3 : Melancholia

-       Un suppôt de Satan :

-       Un chantre de l’humain.

Texte 4 : Chanson

   Le chantre de l’infidélité ;

   Le chantre de la fidélité ;

Texte 5 : Une allée du Luxembourg

-       L’allusion romantique ;

-       L’illusion romantique.

Texte 6 : Trois ans après

-       La perte de repères ;

-       Un repaire de malheurs.

Texte 7 : Neige sur Paris

-       Les mains généreuses ;

-       Les mains maléfiques.

Texte 8 : Que m’accompagnent kôras et balafong

-       L’humanisme du poète ;

-       Le romantisme du poète.

Texte 9 : Une vaillante guerrière

-       La veine martiale ;

-       La veine optimiste.

Texte 10 : Un tableau de la colonisation

   Le camp des tortionnaires ;

   Le camp des victimes.

Texte 11 : Le Chêne et le roseau

-       La veine fantastique ;

-       La veine polémique ;

-       Une triple combimaison.

Texte 12 : L’Ecole des Blancs

-       La maîtrise du public ;

-       La maîtrise du verbe.

Texte 13 : L’Ouragan

-       Le commerce avec les hommes ;

   Le commerce avec les dieux.

Texte 14 : Une ville coloniale

-       La dualité de l’espace ;

-       La multiplicité des fonctions.

Texte 15 : Incipit de L’Etranger

   Un homme singulier ;

   Un milieu singulier ;

   Un style singulier.

Texte 16 : Excipit de L’Etranger

-       Une âme romantique ;

-       Un esprit humaniste.

Texte 17 : Un symbole de la dictature

-       Le régime de la torture ;

-       Le régime de l’onymat.

Texte 18 : L’illusion des indépendances

-       Un lot d’échecs ;

-       L’échec des indépendances.

Texte 19 : Une tentative de viol

-       Le feu du désir ;

-       Le feu de la rage.

Texte 20 : Demain dès l’aube

-       L’anticonformisme du poète ;

-       L’anti-romantisme du poète.

 

 

 

ANNEXES

QUELQUES FIGURES DE STYLE

 

A- Les Figures d’opposition

 

1-   L’Oxymore :figure qui consiste à associer deux mots notamment un substantif et un adjectif dont les sens sont contradictoires.

         Exemple

         « Derrière elle, le front baigné de douces flammes,

            Un ange souriant portait la gerbe d’âmes. » (Texte n°2)

 

2-  L’Antiphrase :c’est l’expression d’une idée ironique par son contraire. 

Exemple : Te voilà beau !

 

3-  Le paradoxe :figure par laquelle on use de propos en complet déphasage d’après l’opinion commune ou générale.

Exemples :« Paris est tout petit, c’est là sa vraie grandeur. »

                                                   (Prévert)

« Les crimes engendrent d’immenses bienfaits et les plus grandes vertus développent des conséquences funestes. »

                                                    (Valéry)

 

4-  Le Chiasme :figure formée de deux groupes de mots dont l’ordre est inversé ; (A+B // B+A).

Exemples : 

        « Le trône en l’échafaud et l’échafaud en trône, » (Texte n°11)

« Il faut manger pour vivre et non pas vivre pour manger. »

                                                     (Molière)

 

 

         

5-   L’Antithèse :c’est le fait d’opposer deux éléments au moyen d’une construction symétrique.

         Exemples :

         « Qui produit la richesse en créant la misère » (Texte n°3)

         « Je vis, je meurs : je me brûle et me noie. » (Louise Labé

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

B-Les Figures de substitution

 

6-   La Périphrase :figure qui représente un mot par  tout un groupe de mots.

         Exemples :

         La langue de Molière pour désigner la langue française.

         « Le vent redouble ses efforts, 
           Et fait si bien qu’il déracine
           Celui de qui la tête au Ciel était voisine, 
           Et dont les pieds touchaient à l’Empire des Morts. » 

          (Texte n°11)

         Notez bien la doublepériphrase.

 

7-   La Métonymie :Elle est une figure qui remplace un mot par un autre qui entretient avec le premier des rapports de proximité.

         Exemple : J’ai bu un verre. / Banjul se querelle avec Dakar.

 

8-   La Synecdoque :Elle désigne la partie par le tout ou la matière par l’objet ou bien le particulier par le général.

         Exemple : Il tua son ennemie par le fer. (Matière pour l’objet)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

C-Les figures de comparaison

 

9-   La Comparaison

Figure qui assimile un comparé à un comparant grâce à un outil de comparaison (comme, pareil à, ainsi que, semblable à…)

         Exemples :

         « Que s’élève mon chant, aussi pur que l’or de Galam. » 

         (Texte n°11)

          « Elle a passé, la jeune fille

           Vive et preste comme un oiseau : » (Texte n°5)

            « Qui[Travailmauvais] se sert d’un enfant ainsi que d’un outil ! »

          (Texte n°3)

 

10-               La Métaphore :C’est une figure d’analogie qui exclut soit        l’outil de comparaison (présence du comparé et du comparant) soit le comparé et l’outil de comparaison (seule présence du comparant).

         Exemples :

         « Gazelle aux attaches célestes » (Senghor, « Femme noire » 

        In : Chants d’ombre)

         « Adieu, doux rayon – qui m’as lui, −

           Parfum, jeune fille, harmonie…

           Le bonheur passait, − il a fui ! » (Texte n°5)

 

11- L’Allégorie :idée générale ou abstraite mise en scène sous une représentation concrète. Elle recourt à une histoire qui cache une deuxième signification. Ainsi celle de surface est l’allégorie d’une seconde.

Exemples :La Pested’Albert Camus(la seconde guerre mondiale).

L’incipit de L’Ex-Père de la Nationd’Aminata Sow Fall (Ces premières pages décrivent la course du soleil, de son lever à son coucher en passant par son point culminant. Cet itinéraire du disque solaire désigne en réalité le cheminement du président déchu.

 

12– Le Parallélisme :on utilise une construction semblable pour deux énoncés. Le parallélisme met en évidence une similitude ou une opposition.

         Exemples : Mon cheval sera le gagnant.  

                            Mon cheval  sera le perdant. (Opposition)

         Partir pour tout laisser quitter pour tout abandonner. (Similitude)

        « Qui fait le peuple libre et qui rend l’homme heureux ! »

         (Victor HUGO, « Melancholia » in : Les Contemplations)

 

13– La Personnification : c’est lorsqu’on donne à une chose ou à un animal des attributs humains.

     Exemples : « Le chêne un jour dit au Roseau :

                       Vous avez bien sujet d’accuser la Nature. »

                   (Texte n°11)

           « Toi Vent ardent Vent pur, Vent-de-belle-saison, brûle

                            toute fleur toute pensée vaine

              Quand retombe le sable sur les dunes du cœur. »

 (Texte n°13)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

D-Les figures d’insistance

 

       14- L’Hyperbole :C’est l’emploi  de termes trop forts, synonyme

        d’exagération.   

         Exemple : Etre mort de honte.

         « Que dis-je, c’est un cap ? C’est une péninsule ! »  (Edmond   

         Rostand, Cyrano de Bergerac)

         On parle ici du nez d’un personnage.

 

15L’Anaphore :c’est la répétition du même mot au début  de plusieurs vers ou plusieurs phrases.

Exemple : 

« Afrique mon Afrique 

 Afrique des fiers guerriers dans les savanes ancestrales 

 Afrique que chante ma grand-mèreau borddeson fleuve lointain »    (David Diop, Coups de pilon)

        « Maudit comme le vice où l’on s’abâtardit,

           Maudit comme l’opprobre et comme le blasphème ! »

(Hugo, « Mélancholia » In :Les Contemplations)

 

16- L’Accumulation :Ajout de mots de même nature grammaticale dans un même vers, dans une même phrase.

Exemples : Au nom du vrai travail, saint, fécond, généreux (« Melancholia », Hugo)

« Ce mobilier est vieux, crevassé, pourri, tremblant, rongé, manchot, borgne, invalide, expirant… » (Balzac, Le Père Goriot)

 

 

17- La Prétérition :figure par laquelle on déclare ne pas parler d’une chose tout en attirant l’attention sur elle.

 

 

Exemple : « Pour expliquer combien ce mobilier est vieux, crevassé, pourri, tremblant, rongé, manchot, borgne, invalide, expirant, il faudrait en faire une description qui retarderait trop l’intérêt de cette histoire, et que les gens pressés ne pardonneraient pas. » (Balzac, Le Père Goriot

 

   18- L’énumération : figure qui consiste à citer ou à donner les dif-    

         férents éléments (ou parties) d’un ensemble (d’un tout).

Exemple : « Manœuvres, petits commerçants, cuisiniers, boys, marmitons,     prostituées, fonctionnaires, subalternes, rabatteurs, escrocs, oisifs, main-d’œuvre pénale, les rues en fourmillaient. » (Texte n°14)

 

     19- L’épiphore : est  une forme  de  répétition d’un mot ou  d’une 

         expression à  la  fin de  deux ou  plusieurs  vers (phrases) qui  se

         suivent voire même  de membres  de phrase. C’est  l’inverse de

         l’anaphore.

         Exemple : 

         « Toi calme Déesse au sourire étale sur l’élan vertigineux de tonsang

        O toi l’Impaludée de ton lignage, délivre-moi de la surrection de mon sang

          (Senghor, « Congo »In :Ethiopiques)

 

     20- L’anadiplose : c’est un procédé de reprise et d’enchaînement : 

         on reprend le dernier mot d’un vers (ou phrase) au début du vers

        suivant.

         Exemples :   « On  songea   à  faire  l’addition. L’addition  était 

         consternante. » (Albert Camus, La Peste)

         « Et contre les portes de bronze je proférai le mot explosif

               teddungal !  

          Teddungal ngal du Fouta-Damga au Cap-Vert. 

               (Senghor, « Teddungal »In :Ethiopiques)

 

 

 

 

E-Les Figures d’atténuation

21- La Litote :une figure qui consiste à dire le moins pour faire comprendre le plus ; à dire peu pour suggérer  beaucoup. Le verbe est généralement à la forme négative. 

         Exemples : « Va, je ne te hais point. » (Corneille, Le Cid).

    « Si je la haïssais, je ne la fuirais pas. » (Racine, Phèdre)

 

22- L’euphémisme :avec cette figure, le but est de remplacer un terme violent ou choquant par un autre plus doux, moins déplaisant, moins agressif.

        Exemple : « C’est à redresser tout ce que l’administration désigne

        sous l’euphémisme « d’errements » que je vous convie. »

        (René Maran, Batouala)

 



[1]- Jean-Michel Adam, Les Textes : types et prototypes. Armand Colin, 2011.

   Jean-Michel Adam est professeur de Linguistique française à l’Université de Lausanne.

[2]- C’est parce que le texte est long qu’on ne l’a pas mis ici. Vous pourrez le retrouver intégralement dans l’échantillon.

[3]- C’est nous qui proposons le titre.

[4] -Si avec le développement de la dissertation, on exige des paragraphes argumentatifs, avec celui du commentaire, il est question tout simplement deparagraphes.

[5]-Vous remarquerez que cette conclusion n’a pas de troisième partie.

[6]_ Ce texte est un extrait du roman Ville cruelle d’Eza Boto. Il n’a pas d’intitulé et c’est nous qui proposons ce titre.

[7]- C’est nous qui proposons le titre.

[8]- C’est nous qui proposons le titre.

[9]- C’est nous qui proposons le titre.

[10]- C’est nous qui proposons le titre.

[11]- C’est nous qui proposons le titre.

[12]- Dans le recueil Les Contemplations, ce poème n’a pas de titre. C’est pour plus de facilité et de simplicité qu’on l’intitule avec les quatre premiers mots du texte.

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